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Laurence G.

Libraire passionnée à Epinal depuis 2013.

Récit complet

Delcourt

24,95
Conseillé par (Au moulin des Lettres)
3 juin 2024

Des cheveux crépus et autres : une bd passionnante !

Ce joli pavé de 212 pages à la couverture texturée magnifique et tout juste paru raconte le calvaire qu'a vécu Rose durant de longues années à cause de sa chevelure crépue.
Née à la Réunion et métisse, elle va subir dès l'enfance des séances de coiffure matinales, interminables et douloureuses ; sa mère refuse qu'elle aille à l'école "peignée comme une sauvage". Elle a beaucoup d'ambition pour sa petite dernière et espère qu'elle fera des études qui l'emmèneront en métropole. Elle est donc très stricte et la coiffure fait partie des pré-requis pour arriver à ces fins.
Au-delà d'un récit à la 1ère personne original, vif et très souvent drôle, Lou Lubie nous apprend énormément de choses sur les cheveux avec des planches informatives mais aussi sur tout ce que les chevelures afro drainent comme signifiants sociologiques.
On suit donc Rose, sa jeune protagoniste, de l'enfance réunionnaise à l'arrivée à Paris après le Bac jusqu'à son diplôme de Master et son premier emploi. Tout ce cheminement est raconté à travers le prisme du rapport de Rose à sa chevelure.
On y apprend entre autres que les pressions familiales et sociétales sont telles vis à vis des femmes aux cheveux crépus qu'elles passent un temps énorme à se faire coiffer et y laissent un argent monstre sans compter la souffrance qui accompagne les séances répétées de défrisage et qui contribuent à ce qu'elles nient leurs racines... Rose ne va pas y couper et ses cheveux vont lui mener la vie dure !
Très bien construite, avec un dessin épuré mais expressif, cette Bd traite d'un sujet jamais abordé encore en bande dessinée mais extrêmement intéressant. L'auteure-illustratrice crée beaucoup d'empathie et dévoile tout ce que peuvent subir les petites filles et les femmes à cause de leur chevelure ! Une lecture chaleureusement conseillée, pour ados et adultes.

Conseillé par (Au moulin des Lettres)
14 mai 2024

Parce que notre présent est pétri de passé, un livre salutaire.

Hervé Le Tellier, suite à l'achat d'une maison dans la Drôme, découvre le personnage d'André Chaix, un jeune du village dans lequel il s'installe, mort le 23 août 44, abattu par les Allemands avec d'autres à Grignan.
Il questionne les habitants du village, fouille dans les archives, rencontre les membres d'une association et de fil en aiguille rassemble un matériau qui l'incite à reconstituer la vie courte de ce garçon au physique à la Gabin.
Ses recherches le conduisent à une réflexion qui va au-delà du portrait plein d'empathie pour ce jeune résistant, mêlant des considérations sur l'engagement, la liberté de penser et d'agir, la loi du groupe.
Dans l'interrogation constante y compris de son propre comportement, l'auteur, récompensé par le Goncourt en 2020, suit avec patience et intelligence le fil de l'Histoire et les conséquences de nos choix.
Ce qui est écrit sur la quatrième de couverture résume l'une des raisons pour lesquelles est né ce livre : " Quatre-vingts années ont passé depuis sa mort. Mais à regarder le monde tel qu'il va, je ne doute pas qu'il faille toujours parler de l'Occupation, de la collaboration et du fascisme, du rejet de l'autre jusqu'à sa destruction. Ce livre donne la parole aux idéaux pour lesquels il est mort et questionne notre nature profonde, ce désir d'appartenir à plus grand que nous, qui conduit au meilleur et au pire."

Le Lombard

23,50
Conseillé par (Au moulin des Lettres)
13 mai 2024

Un gros coup de coeur pour une très belle BD à lire, de 12 à 99 ans !

L'histoire se passe au Moyen Âge. Martino est un garçonnet albinos rejeté par tous car différent et malgré l'amour que ses deux soeurs lui portent, il ressent cette différence comme un poids. Son père qui en a assez de lui décide de l'éloigner ce qui va provoquer la fuite du garçon dans la forêt où il va rencontrer une jeune femme qui y a trouvé refuge elle aussi, loin de la violence et de l'intolérance des hommes... Une très belle histoire de rencontre et d'acceptation de soi grâce à l'amitié et à la rébellion avec un dessin absolument superbe !

François Médéline

Manufacture de livres

21,90
Conseillé par (Au moulin des Lettres)
17 avril 2024

Quand le réel s'allie à la fiction dans un excellent roman noir sans temps mort

François Médéline a au moins 3 amours : le noir, la politique et les salauds. Avec "La résistance des matériaux", son dernier roman, il réussit un coup de force en alliant ces combustibles au pouvoir explosif reconnu.
Natif de Lyon, Médéline a déjà démontré ses qualités d'auteur avec entre autres "Les larmes du Reich" et "La sacrifiée du Vercors", deux polars qui se déroulent en 1951 pour l'un et en 1944 pour l'autre et dans lesquels on règle des comptes avec une âme peu reluisante accrochée en bandoulière.
Les salauds, donc, il les aime sans doute et avant tout parce que ce sont d'excellents personnages de fiction et qu'un bon salaud équivaut largement à 3 types sympas quand il s'agit de réveiller un un lecteur sommeillant.
Avec "La résistance des matériaux" il choisit de nous plonger dans un passé tout frais et de relater une affaire qui a défrayé la chronique : celle du compte suisse non déclaré d'un certain Cahuzac alors ministre de Hollande.
S'appuyant sur des personnages fictifs au caractère bien trempé - telle cette jeune députée issue des quartiers populaires, aux ongles laqués et aux dents acérées, ou encore un ancien barbouze qui occupe une place non négligeable dans l'histoire quand il s'agit de protéger les intérêts d'une grosse entreprise de BTP...- il fait naviguer le lecteur dans les coulisses de la politique parisienne et provinciale.
La trame entremêle des chapitres aux points de vue différents intercalant des conversations téléphoniques captées par les Américains entre Hollande et Le Fol, ajoutant par-ci par-là un Sarkozy au pouvoir comique insoupçonné.
Un flic à la ramasse, des conseillers politiques dépassés et des journalistes tenaces complètent une galerie de personnages inoubliables.
Un sacré bon roman donc où réel et fictif forment un duo jouissif.
Nous accueillerons F. Médéline samedi 04 mai à la librairie !

Conseillé par (Au moulin des Lettres)
8 avril 2024

Un 1er roman remarquable !

Découvrir un nouvel auteur est toujours une expérience exceptionnelle dans mon parcours de lectrice ; j'ai eu le bonheur de trouver sur mon chemin ces jours derniers ce très beau roman d'un jeune auteur afro-américain entendu en septembre au Festival America.
Harris a situé son histoire dans l'Etat de Géorgie à la fin de la guerre de Sécession en 1865 et nous raconte l'histoire de deux frères, Prentiss et Landry, jeunes adultes esclaves jusque-là dans une plantation et qui décident d'en partir dès leur liberté proclamée.
Campant dans les bois tout proches, ils essayent d'imaginer ce que la vie va pouvoir désormais leur offrir et doivent tout d'abord trouver du travail mais aucun blanc ne veut embaucher les esclaves affranchis en les rémunérant.
La rencontre avec le propriétaire des terres où ils se sont arrêtés va bouleverser leur plan et leur vie.
George Walker vient, lui, de perdre son fils parti à la guerre. Empli de chagrin, la rencontre avec ces deux garçons va lui permettre de reprendre vie. Il va leur proposer de travailler ses terres en les payant car la confiance s'établit très vite entre eux. Mais dans un pays déchiré par 4 ans de guerre civile, la haine et le mépris des vaincus ne peut que se déchaîner sur ceux qui représentent un nouvel ordre des choses.
Les personnages, principaux ou secondaires, sont tous très bien dessinés. Le couple que forment Walker et sa femme, Isabelle, sont deux caractères riches et originaux.
La tension du roman va crescendo et le style de Harris d'une maturité impressionnante participe indubitablement au plaisir de lecture.
Racisme, égoïsme, étroitesse d'esprit et hypocrisie sont les maux qui vont accabler nos personnages, doués comme le phénix du pouvoir de renaître des cendres...