Cartographie de l'oubli

La Namibie est un pays du Sud Ouest de l'Afrique. Dès la fin du XIX siècle, les Allemands prirent possession du territoire pour y créer une grande colonie. Le héros du roman fait partie des premiers soldats envoyés sur le terrain pour construire les premières villes et passer des accords avec les populations locales. Ce jeune allemand plein de bonnes attentions, se révèle rapidement être un anti-héros. Il comprendra bien vite que le Reich veut contrôler et posséder totalement le pays, au risque de déclarer la guerre aux natifs. C'est l'histoire de ce jeune allemand qui est le principal attrait du roman. On croise aussi un autre personnage. Celui-ci vit en 2004 en Namibie. Il doit apprendre à vivre avec le passé de son pays, tout en regardant vers l'avenir. Les pensées, plutôt sombres, de cet homme s'entremêlent au récit du soldat allemand pour un résultat saisissant. On est avec eux dans le désert, dans les villes artificielles qui trônent au centre de nulle part.
Voyage magnifique dans l'Histoire et dans le cœur des hommes, Cartographie de l'Oubli est le roman de la rentrée à ne pas manquer.

Fin XIXème siècle : l'Allemagne met sous son protectorat le sud-ouest africain. L'Empereur allemand commence avec quelques hommes, dont Jakob soldat envoyé avant tout loin de l'Allemagne, et de modestes ambitions : faire vivre quelques colonies et établir des accords avec les peuples autochtones (à l'avantage de l'Allemagne tout de même...). Peu à peu les ambitions colonialistes de l'Allemagne se feront plus pressantes, les ressources minérales se révélant fort intéressantes. Pour que le projet soit économiquement intéressant, il va falloir faire plus que dominer le peuple africain : il va falloir l'asservir. Jakob va vivre cette sinistre épopée depuis le premier jour et glisser au diapason du pouvoir allemand vers cette soif de domination, quitte à perpétrer et justifier des actes abominables.

Année 2004 : un jeune métis namibien vient assister à la cérémonie de commémoration du massacre de Herreros. Il s'interroge sur cette culture perdue, ses origines allemandes et cette position de métis, peut-être plus enviable que celle de noir sous l'apartheid, s'il est préférable de n'appartenir à aucun peuple.

Il faut être doué pour réussir un premier roman avec ce degré de maîtrise entre Histoire, histoire et progression des personnages. Niels Labuzan nous fait aussi comprendre une chose : le XXème siècle allemand a commencé en Afrique, laboratoire de théories raciales largement diffusées par la suite.