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Introduction à la stylistique, avec exercices corrigés
EAN13
9782200354381
ISBN
978-2-200-35438-1
Éditeur
Armand Colin
Date de publication
Collection
U
Nombre de pages
126
Dimensions
1,8 x 1,3 x 0,1 cm
Poids
135 g
Langue
français
Code dewey
808

Introduction à la stylistique

avec exercices corrigés

De

Armand Colin

U

Indisponible
1?>L'organisation textuelle?>L'étude stylistique d'un texte commence par l'observation de sa structure d'ensemble. Son articulation apparaît-elle d'emblée dans sa disposition à l'intérieur de la page ? Le paragraphe dans le texte en prose non théâtral, la réplique courte ou la tirade dans le discours dramatique, la strophe dans le poème sont autant de procédés de segmentation qu'il convient d'examiner en premier lieu.I. le paragraphe?>Dans un texte en prose, en particulier dans le texte romanesque, il faut s'interroger sur le rôle des paragraphes, qui d'abord sont là pour faciliter la lecture mais ont aussi une fonction sémantique* en définissant une unité de sens.On remarquera que la fonction du paragraphe a évolué au XIXe siècle: alors que jusque-là, le retour à la ligne est peu fréquent, comme on peut le voir dans La Princesse de Clèves par exemple, et qu'il correspond essentiellement à un changement de lieu ou de jour, à partir de l'époque romantique ses fonctions deviennent beaucoup plus complexes.I.I Longueur des paragraphesLe paragraphe courtLe paragraphe court segmente le propos. Réduit à une seule phrase, elle-même limitée à une proposition simple, voire minimale, il peut aboutir à dramatiser ou solenniser le propos. Ainsi, l'organisation des paragraphes chez Hugo correspond à une véritable mise en page de la tension dramatique :Peu à peu, cette tache, qui n'était plus une forme, pâlit.Puis elle s'amoindrit.Puis elle se dissipa.À l'instant où le navire s'effaça à l'horizon, la tête disparut sous l'eau. Il n'y eut plus rien que laFin des Travailleurs de la mer.
Le blanc qu'instaure le retour à la ligne peut également correspondre à une ellipse dans la narration, et le paragraphe court marquer un « extraordinaire changement de vitesse » (M. Proust, À propos du style de Flaubert, 1920) dans le récit :Il voyagea.Il connut la mélancolie des paquebots, les froids réveils sous la tente, l'étourdissement des paysages et des ruines, l'amertume des sympathies interrompues.Il revint.Flaubert, L'Éducation sentimentale, troisième partie.
004 Ces trois paragraphes qui ouvrent l'avant-dernier chapitre traduisent à la fois l'ennui du héros et le grand « blanc » chronologique qui sépare l'essentiel de la diégèse* - où les personnages sont « emboît [és] dans les événements de 1848 » (Flaubert) - de son dénouement, la dernière rencontre entre Madame Arnoux et Frédéric.Flaubert ne veut pas, comme il l'écrit à Louise Colet, « une série de paragraphes tournés, arrêtés, qui ne dévalent pas les uns sur les autres ». « Il va falloir, conclut-il, les dévisser, lâcher les joints, comme on fait aux mâts de navire quand on veut que les voiles prennent plus de vent ». Il donne ainsi l'impression que « ça n'est jamais fini » (M. Sandras, « Le blanc, l'alinéa », in Communications, n° 19, 1972). Bourget, dans ses Essais de psychologie contemporaine (Plon, 1920) s'insurgeait d'ailleurs contre la décomposition du livre, contre l'autonomie laissée à la page et au paragraphe, symptôme à ses yeux d'un style de décadence.À partir du milieu du XIXe siècle, le paragraphe très court se rencontre souvent dans le roman. Il convient de réfléchir à ce qu'apportent à la narration ces respirations nombreuses :Revenus à Visagra, Manuel appela. Rien ne répondit. Il appela de nouveau. Rien. Il monta au dernier étage de la maison d'où il put découvrir les toits. Derrière chaque angle, là où il avait posté un homme, il y avait un fusil abandonné.Même les trois fusils-mitrailleurs. Visagra était encore défendue : défendue par des armes sans hommes.On manquait de fusils au front de Malaga, au front de Cordoue, au front d'Aragon. On manquait de fusils à Madrid.Sur une aire à peine éloignée, on battait du blé...Manuel jeta enfin sa branche, redescendit, les jambes en coton. Toutes les portes étaient ouvertes : à côté des fenêtres, appuyés aux rideaux, les derniers fusils veillaient sur Tolède.Malraux, L'Espoir, première partie, II, II, 7.005 La narration épouse le point de vue du personnage Manuel, en une focalisation interne*. De la constatation, à partir de ce qu'il contemple du haut des toits, que Visagra est une « tanière de fuyards », Manuel passe à la réflexion sur la situation paradoxale dans laquelle se trouvent les révolutionnaires (paragraphe 2). Son regard en même temps enregistre le spectacle qui s'offre à sa vue (paragraphe 3). Puis le personnage revient à la réalité de l'action (paragraphe 4), sans que néanmoins sa réflexion soit totalement interrompue (la fin du paragraphe 4 correspond à la fin du paragraphe 1). Les blancs typographiques, en ménageant une pause entre narration, ébauche d'un monologue intérieur*, description subjective et reprise de la narration, suffisent à indiquer implicitement que les quatre segments ne sont pas exactement sur le même plan narratif : le commentaire explicite du narrateur n'est pas nécessaire.
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