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Mon intime conviction
Format
Broché
EAN13
9782845922907
ISBN
978-2-84592-290-7
Éditeur
Presses du Châtelet
Date de publication
Collection
SPIRITUALITE
Nombre de pages
183
Dimensions
22,5 x 14,1 x 1,1 cm
Poids
260 g
Langue
français
Code dewey
297.27
Indisponible
DU MÊME AUTEUR

L'Autre en nous, Presses du Châtelet, 2009.

Islam, la réforme radicale, Presses du Châtelet, 2008.

Un chemin, une vision. Être les sujets de notre histoire, Tawhid, Lyon, 2008.

Quelques lettres du cœur, Tawhid, Lyon, 2008.

Muhammad, vie du Prophète, Presses du Châtelet, 2006.

Faut-il faire taire Tariq Ramadan ? entretiens avec Aziz Zemouri, l'Archipel, 2005.

La Mondialisation : résistances musulmanes, Tawhid, Lyon, 2004.

Peut-on vivre avec l'islam ? entretiens avec Jacques Neirynck, Favre, Lausanne, 1999 (4eéd. 2004).

Les Musulmans d'Occident et l'Avenir de l'islam, Actes Sud, 2003.

Jihad, violence, guerre et paix en Islam, Tawhid poche, Lyon, 2002.

Dar ash-shahada : l'Occident, espace du témoignage, Tawhid poche, Lyon, 2002.

La Foi, la Voie, la Résistance, Tawhid poche, Lyon, 2002.

Musulmans d'Occident, construire et contribuer, Tawhid poche, Lyon, 2002.

De l'islam, Tawhid poche, Lyon, 2002.

L'Islam en questions, avec Alain Gresh, Actes Sud, 2000 (2eéd. Actes Sud « Babel », 2002).

À Alain Gresh
À François Burgat

Ce livre constitue une édition revue et augmentée du livre Face à nos peurs, publié par les éditions Tahwid en 2008.

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eISBN 978-2-8459-2438-3

Copyright © Presses du Châtelet, 2009.

Préambule

DE LA VISIBILITÉ

Les controverses se suivent et se ressemblent. Durant les cinq dernières années, je me suis retrouvé au centre de polémiques qui, au-delà de ma personne, révèlent la nature des problèmes qui traversent les sociétés occidentales. Force est de constater que le pluralisme politique ne garantit point la gestion raisonnable et sereine du pluralisme culturel et religieux. En France comme aux États-Unis, en Belgique, en Suisse, en Angleterre, en Italie, en Espagne, et récemment aux Pays-Bas, j'ai fait face à des controverses nationales dont le point commun était, assez clairement, la nouvelle visibilité des citoyens occidentaux de confession musulmane. Chaque pays a sa culture, sa sensibilité propre, ses « pointes de friction », et, ce faisant, sa liste spécifiquement ordonnée de contentieux à régler avec l'islam et les musulmans. Le « foulard islamique » vient en tête en France ou en Belgique, les questions liées à l'homosexualité et aux mœurs aux Pays-Bas, les minarets en Suisse, etc. La violence, la femme, la « sharî'a » (charia) sont, entre autres, des thèmes qui reviennent partout et toujours : l'islam fait question.

Le point commun de tous ces débats tient à l'installation de générations successives de musulmanes et de musulmans, devenus citoyennes et citoyens de leur pays respectif. Installés, ils sortent de leur isolement géographique, de leurs ghettos sociaux, ou de leur marginalité sociopolitique. Ils sont désormais visibles, comme le relevait, il y a des années déjà, la sociologue Nilüfer Göle. Leur visibilité marque et prouve leur décloisonnement : il ne s'agit pas d'une nouvelle « communauté religieuse ou culturelle » qui s'installe, mais plutôt de l'émancipation d'une ancienne catégorie socio-économique (doublée d'une appartenance majoritaire à une même origine culturelle et religieuse) qui avait été doublement marginalisée, géographiquement et socialement.

Au gré des controverses et des crises, des peurs s'alimentent et des perceptions se façonnent et s'entretiennent. La crainte, la méfiance et le soupçon s'installent et tous les débats sur la culture et la religion se transforment en polémiques nationales, polémiques qui se caractérisent par des crispations et des surdités inquiétantes. Les médias rapportent les faits, les réactions s'amplifient, les politiciens réagissent à (ou parfois instrumentalisent) la controverse, et nous voilà embarqués dans des dynamiques incontrôlables. Des positionnements se dessinent, une sorte de clivage qui traverse tous les partis politiques, de gauche comme de droite, ainsi que les populations des sociétés occidentales. Alors que l'on parlait hier d'un éventuel « clash des civilisations », j'ai défendu très tôt l'idée d'un « clash des perceptions » : un conflit d'images projetées sur soi et sur autrui, mêlant des doutes (quant à soi), des peurs (quant à autrui), des préjugés, ou simplement de l'ignorance (vis-à-vis de soi et d'autrui). On y trouve aussi parfois des positions idéologiques et politiques peu claires. Dans la nébuleuse des propos tenus, face à la visibilité de cet « autre », les débats récurrents sur « l'identité » deviennent dangereux et produisent exactement le contraire de ce que l'on pourrait espérer. À l'heure des crispations, nos identités deviennent négatives et se forment par distinction (crispation ou rejet) de ce que l'on croit être l'identité de « l'autre ». Il s'agit ainsi d'une « identité soustraite », cloisonnée et rigide, alors que nous aurions tant besoin d'accéder au sens d'une identité multiple, ouverte et en constant mouvement.

Dans la proximité, la présence d'autrui perturbe et gêne. C'est la raison pour laquelle les crises se sont surtout multipliées autour de phénomènes visibles et spectaculaires : foulards islamiques, niqab (voile cachant le visage), burqa, minarets, auxquels il faut ajouter les expressions culturelles ou religieuses perçues comme « étrangères », c'est-à-dire différentes, inhabituelles ou trop « visibles » car pas encore « normalisées » (voire « neutralisées », au sens de rendues « neutres » dans l'espace public). La violence a bien sûr été un facteur majeur d'amplification, avec le rejet d'assassinats aveugles perpétrés contre des innocents au nom de la religion musulmane. Tous ces phénomènes cumulés expliquent la situation présente, et la « nouvelle visibilité » des musulmans continue de provoquer son lot de crises cycliques. Gardons en tête que cette « nouvelle visibilité » est par nature une situation historique transitoire puisque ce qui est nouveau sera un jour ancien.

Nous voici revenus au temps de la dangereuse « politique émotionnelle ». L'autre nom de cette politique qui joue de l'émotion est « le populisme », et aucune société contemporaine n'en est définitivement protégée. Les anciens racismes peuvent encore habiter notre avenir.

Dans les débats de société sur l'islam, j'ai souvent joué le rôle de « l'intellectuel visible » : j'ai souvent essuyé des critiques très émotives et fait l'objet de projections qui m'ont parfois amusé, parfois franchement inquiété. Il n'est pas facile d'être au paysage intellectuel ce que le minaret est à la rue ! Présent, installé, en « nous » mais apparemment si différent de « nous ». Un « nous » réactif, exclusif, parfois dogmatique qui me mettait « à l'extérieur », étranger, autre, en un « vous » de la différence. Lors de la première conférence d'Estoril au Portugal en mai 2009, j'ai été interpellé à deux reprises comme un étranger alors même que mon sujet était « notre » Europe. L'ancien président du gouvernement espagnol José María Aznar, en affirmant qu'il n'y avait qu' « une seule civilisation [...] des gens civilisés », ne savait plus vraiment où me placer dans ce paysage. Entre le « nous » restrictif et le « nous » dominant, où peut-on bien situer celles et ceux que l'on considère comme les « étrangers » peu « civilisés » – à dominer, dompter, domestiquer ? Ces étrangers de l'intérieur, les « citoyens immigrés » ou les « immigrés citoyens », les allochtones jamais vraiment autochtones (selon la terminologie néerlandaise) : on peine à traduire des perceptions qui en fait défient les catégories les plus élémentaires du droit.

Les perceptions sont aussi des faits et il faut compter avec leur prégnance sur l'ensemble des débats contemporains. Un rapport de l'institut américain Gallup (mai 20091) montre l'incroyable fossé entre les populations européennes en général et leurs concitoyens musulmans. Près des trois quarts des musulmans se sentent et se disent loyaux envers leur pays (France, Allemagne, Royaume-Uni pour le sondage) tandis q...
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