Commémorer les sciences de l'homme

Dans l’histoire des sciences humaines et sociales (SHS), les commémorations, fréquentes, sont l’occasion de manifester des tensions internes ou externes aux disciplines. Le cinquantième anniversaire de la mort du psychiatre martiniquais Franz Fanon a ainsi fait l’objet en 2011 d’une large couverture médiatique et a été à l’origine de débats fortement politisés. Davantage que le passé, les commémorations évoquent avant tout des conflits et incertitudes du présent. Elles sont un observatoire de l’état d’un champ scientifique à un moment donné. Les articles de ce dossier prennent le mot commémoration au sens étroit de cérémonie en souvenir d’un événement ou d’un défunt. La dimension rituelle paraît en effet essentielle en ce qu’elle permet de mettre en évidence l’articulation des enjeux internes aux disciplines et leur mise en scène publique. Stratégies internes et signaux politiques en direction des pouvoirs publics ou des publics en général ne peuvent ainsi pas être dissociés. À ceux-ci s’ajoute une interrogation sur l’éventuelle formulation de discours mettant en avant une spécificité des SHS (face aux autres sciences, à la littérature, au politique) dans ces moments commémoratifs.