www.leslibraires.fr
Natures mortes, thriller
Format
Poche
EAN13
9782352870517
ISBN
978-2-35287-051-7
Éditeur
Archipoche
Date de publication
Collection
Bibliothèque du collectionneur (49)
Nombre de pages
341
Dimensions
17,8 x 11 cm
Poids
205 g
Langue
français
Code dewey
849
Trouvez les offres des librairies les plus proches :
ou
entrez le nom de votre ville

Offres

  • Vendu par Librairie Le Forum du Livre
    1.98 (Occasion)
DU MÊME AUTEUR

La Gaga des traboules, L'Archipel, 2007.

Mister Conscience, Archipoche, 2006. Prix LGM/Lire 2007.

La République de Gus, A contrario, 2004.

La Saône assassinée, Le Masque, 2004.

L'Enfant au masque, Le Masque, 2003.

Étranges nouvelles de Bourgogne, éditions JPM, 2003.

L'Inconnue de l'écluse, Le Masque, 2002.

Stone, Flammarion, 2002.

Les Sorciers de la Dombes, Viviane Hamy, 2001.

La Peste blonde, Viviane Hamy, 2001, J'ai Lu, 2002.

Implacables vendanges, Viviane Hamy, 2000.

Prix Métiers et Culture 2001.

Les Croix de paille, Viviane Hamy, 2000, J'ai Lu, 2002.

Prix Océanes 2001.

Si vous souhaitez recevoir notre catalogue et être tenu au courant de nos publications, envoyez vos nom et adresse, en citant ce livre, aux éditions Archipoche, 34, rue des Bourdonnais 75001 Paris.

Et, pour le Canada, à
Édipresse Inc., 945, avenue Beaumont,
Montréal, Québec, H3N 1W3.

eISBN 978-2-3528-7527-7

Copyright © Archipoche, 2007.

À Thierry Ehrmann,
avec mes souhaits de longue vie
à la Demeure du Chaos.

Surréalisme

Ô grand carré qui n'a pas d'angles
Grand vase jamais achevé,
Grande voix qui ne forme pas de paroles
Grande apparence sans forme !

Lao-tseu

1

Fichu réveil. L'homme, peu à peu, réalise qu'il est enchaîné, avachi sur le sol en position fœtale. Ses poignets brûlent, ses chevilles le tiraillent – des anneaux cadenassent ses chairs indurées. D'un mouvement machinal, il tente de se redresser. La manœuvre lui extirpe un cri sourd. Quelle qu'en soit la partie, son corps le fait souffrir. Son crâne par-dessus tout – ouvert, il le sent, sur l'aire occipitale. Son cuir chevelu est poisseux, du sang coule sur sa nuque. Il veut tâter la plaie, estimer sa profondeur, mais son geste s'arrête au seuil des clavicules. Inutile d'insister, ses chaînes sont trop courtes. Pourtant, il doit se relever, il ne peut rester à terre, cloué, résigné comme un chien. Alors il se concentre, analyse, diagnostique, inventorie ses maux, cherche le mouvement optimal qui conjurera la douleur.

Théorie minimis, principe de moindre action, il est enfin assis, ou plutôt recroquevillé, le dos collé à un mur froid. Ses facultés sensorielles reviennent. Olfactives, d'abord, le nez agressé par des relents pharmaceutiques. Que sent-il au juste ? Il n'en sait rien, étranger à l'osmologie médicale. Ses narines ne témoignent que d'un vif picotement, irritant et tenace, lié aux agressions d'une puanteur sudorale. Sa vue, ensuite, s'habitue à la pénombre. « Où suis-je ? s'interroge-t-il en fouillant l'obscurité, c'est quoi ce cauchemar ? » Il force sa mémoire, revisionne le film de ces derniers jours. Que de larmes sur l'écran, de morts et d'épouvante. La frayeur envahit chaque plan, l'horreur noircit les images, l'intrigue est infernale. L'adjectif lui convient, sa trame est monstrueuse. Quoique diabolique la qualifierait mieux encore. Sa raison fait valoir qu'elle suinte d'ésotérisme, un terme qu'il déteste, ridicule et fumeux. Mais il a beau chercher, il n'en voit pas de plus précis. « Je n'en ai rien à foutre de ces meurtres, grince-t-il, ce sont leurs oignons, pas les miens. » Si au moins il savait qui l'a amené là, il pourrait se justifier, prouver à son geôlier qu'il est une erreur de casting, un figurant anachronique.

— Ça y est, t'émerges enfin ?

Une voix d'homme, rocailleuse, altérée, retentit sur sa gauche. Perchée très haut, dans l'encoignure d'une passerelle, une veilleuse de chantier éclaire à peine l'espace. Malgré son indigence, son halo lui permet de distinguer son voisin. La surprise est mauvaise, il déteste ce porc. Depuis peu, il est vrai.

— Décidément, on ne se quitte plus, raille-t-il... T'es enchaîné ?

Bizarre, comme celle de ce verrat, sa voix est dysphonique, il n'en reconnaît pas la musique.

— Ouais, autant que tu me parais l'être, grogne l'autre... Ça me sidère, ce binz, tu ne devrais pas être là, t'es en dehors du coup.

Sur ce point, ils sont d'accord, ce qui n'a pas toujours été le cas. Mais à quoi servirait d'en disserter ? À rien, le mal est fait. Mieux vaut, se suggère-t-il, utiliser sa salive pour des questions utiles.

— Où on est ? T'en as une idée ?

— Pas vraiment, répond le type au timbre rauque.

L'endroit ressemble à un vieil entrepôt, un hangar retapé. Ce dont il est certain, c'est qu'il longe une ligne de chemin de fer ; il a entendu des convois. De même, claque-t-il des dents, qu'il y fait un froid mortel. À ces mots, l'homme au crâne ouvert s'aperçoit qu'il grelotte. Au mieux de sa forme, le thermomètre doit tutoyer les 5 °C. Que faire pour combattre l'ankylose et la chair de poule ? Parler, bien sûr, parler de ce drame qu'ils ont traversé. Lui en figurant, son fumier de compagnon en acteur principal. D'ailleurs, pourquoi attendre ? Ce salaud doit lui rendre des comptes. Et tout de suite, pas demain !... Demain sera trop tard... Mais par quoi commencer ? Les bobines sont mélangées.

— En clair, tu sais quoi de ce boxon ? anticipe l'acteur qui devine ses pensées.

— Des choses que tu ignores, et vice versa, c'est logique.

— Logique ? grasseye l'autre en ricanant. Il n'y a que toi pour en voir dans ce foutoir... Un sac de nœuds, voilà ce que c'est, et encore sans ficelle...

Une quinte de toux jugule son persiflage. Il la met à profit pour réfléchir à toute allure.

— J'ai un marché à te proposer, reprend-il d'une voix de rogomme, tu me racontes ta version et je te livre la mienne.

— Sans mentir ? Franchement ? C'est pas ton genre.

— Tu as ma parole.

— J'ai appris à m'en méfier... C'est quoi, le bénéfice ?

— Qu'à deux on a une chance de reconstituer ce puzzle.

— T'appelles ça un puzzle ? Tu te plantes, l'ami, c'est un labyrinthe.

— Puzzle ou labyrinthe, on s'en tape le coccyx, il faut qu'on s'y retrouve avant de devenir fous... Ou si tu me permets un poil d'humour : qu'on replace les couleurs de ce maudit tableau.

Le figurant se marre – par dérision, il n'a pas le cœur à rire.

— « Maudit tableau », t'as le sens de la formule. Tu sais quoi ? Elle me rappelle une phrase de Gide : « Il n'est point de véritable œuvre d'art où n'entre la collaboration du démon. » Elle colle à cet enfer, non ?

L'acteur l'approuve, à ceci près, ajoute-t-il avec appréhension, qu'ils sauront bientôt à quoi ressemble le diable... Il a, hélas, une idée peu réjouissante de son identité.

— Un tordu qui veut se venger, tu t'en doutes... Si c'est celui que je soupçonne, c'est moi qu'il tuera.

Un temps, deux pauses, un soupir, il hésite.

— Dans le cas contraire, j'ai bien peur que ce soit toi qui y passes... Désolé, camarade, je ne suis pour rien dans ce choix... Je vais te dire pourquoi...

Le figurant déglutit. Abondant et amer, un flot de bile envahit sa bouche. Ses lèvres se tendent, son verbe s'emballe : l'un d'eux doit mourir et on ne sait pas lequel ?... Mais c'est quoi cette loterie ?! Qu'en a-t-il à battre de ses explications ? ! Qu'ils se massacrent entre dingues puisqu'ils adorent s'égorger, lui est étranger à ce merdier, il n'a jamais demandé à y être mêlé ! Son compagnon hurle qu'il ne l'a pas cherché non plus ! Tout ce qu'il voulait, c'était qu'on lui foute la paix ! La paix, rien que la paix !

Un train roule près du hangar, ses trépidations couvrent leurs insultes.

Les deux hommes se calment. L'acteur reprend son souffle.

— Bon, on se lance ? Je parle le premier, tu interviens quand tu veux.

Après tout, qu'a-t-il à perdre ? Le figurant accepte ce protocole.

Leur remontée dans le temps commence...

2

Septembre s'approchait de l'automne. C'était un matin clair, à peine métallique, propice à la promenade.

À première vue, il semblait qu'un couple, installé dans une Mégane, profitait de cette queue d'été. Autour de lui, la forêt l'invitait à une balade. Atout non négligeable, personne ne foulait ses sentiers. Rien d'anormal à ce vide puisqu'on était lundi.

Mais non, depuis la sortie de Fontainebleau, le tandem filait vers le sud-est, sans remarquer la nature qui lui faisait de l'œil.

L'homme conduisait, crispé, plus tendu qu'un sandow. Peu à l'aise au volant, il détestait la vitesse. Le front plissé, il jeta un regard stressé sur l'horloge de bord.

— L'heure tourne... C'est encore loin ?

La jeune femme consult...
S'identifier pour envoyer des commentaires.