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sandrine57

Lectrice compulsive d'une quarantaine d'années, mère au foyer.

Conseillé par
3 septembre 2014

Rio de Janeiro, fin des années 20. Brancura est un malandro, un beau gosse, arnaqueur et proxénète. Bien sûr, il voudrait être honnête, travailler, épouser une vierge et écrire les meilleures sambas du pays, comme le fait déjà Silva dont une samba a été enregistrée par Alvès, la voix d'or du Brésil. Mais la Zone l'attire comme un aimant et ses bonnes résolutions fondent devant Valdirène, la plus belle prostituée du quartier qui rend fous tous les hommes qui la croisent.

C'est souvent que Brancura doit sortir son coupe-chou pour éloigner les amoureux transis de la belle. Son rival, son ennemi même, c'est Sodré, un employé de banque, blanc, portugais, qui voudrait lui piquer sa belle et sa place dans la Zone. Valdirène les désire, les aime, les trahit, est incapable de les départager. Tout cela empêche Brancura de se donner entièrement à la musique comme le font Silva, Bide et tous les autres. Entre deux parties de bonneteau truquées, deux bagarres avec la police, deux tournées de cachaça, tous réinventent le rythme de Rio. Ils font fi des vieilles musiques, se fabriquent des percussions pour créer la samba d'avant-garde, sensuelle, troublante, entraînante.

Tel un ethnologue, Paulo LINS nous offre une plongée dans le creuset d'un quartier mal famé de Rio. Dans la Zone se côtoient malfrats, proxénètes, mafieux juifs, artisans, employés de banque, poètes et chanteurs en vogue, descendants d'esclaves ou de colons portugais, noirs et blancs. S'inspirant de la capoiera, des traditions du condamblé, puisant dans leur quotidien difficile les paroles de leurs chansons, ils innovent pour créer une samba capable de rameuter les foules lors de chaque fête. La police veille au grain. Les noirs ont interdiction de se rassembler, la samba est interdite aussi. Qu'à cela ne tienne ! Ils vont s'associer, se donner un statut en formant un ''bloco'' (association de quartier qui défile au carnaval) et faire naître les premières écoles de samba. Moyen d'intégration, la musique est aussi source de conflits. Apparaissent les premiers contentieux au sujet des droits d'auteurs, les rivalités entre ceux qui réussissent et les autres, les vols de musique.
Roman foisonnant, enfiévré et truculent, Depuis que la samba est samba est une fresque où bouillonnent le sang, le sperme, la sueur et la musique sous le soleil langoureux de la Cité Merveilleuse. Amours passionnelles, rivalités obsessionnelles, rythmes endiablés...un roman qui emporte le lecteur dans un monde inconnu et pittoresque. A découvrir.

Éditions de L'Olivier

Neuf 16,00
Occasion 3,19
Conseillé par
31 août 2014

Dans l'appartement, modeste mais bien tenu, de la famille Melki, à Constantine, la joie n'est pas souvent à l'ordre du jour. Les hommes, Haïm et son aîné Abraham, ordonnent, les femmes, Rachel et sa bru Madeleine, obéissent et se taisent. Le seul rayon de soleil, c'est Jacob, le dernier né de Rachel, son fils chéri, sa réussite. Lui seul sait mettre de la gaîté entre ces murs où trop souvent résonne la fureur du père. Lui seul joue avec ses nièces, Fanny et Camille, les fait voler comme un avion. Lui seul sait trouver les excuses qui évitent à Gabriel, son neveu, les corrections que trop souvent il mérite. Lui seul voit la peine de Madeleine, séparée de sa famille restée à Tunis, esclave de sa nouvelle famille malgré ses huit mois de grossesse, mal-aimée par un mari autoritaire. Brillant, beau, généreux, Jacob a 19 ans en cette année 1944.

Il sort à peine de l'adolescence mais sait qu'il doit répondre à l'appel de la France qui a besoin de troupes pour chasser l'envahisseur Allemand, là-bas, loin, en Europe. Jacob va faire ses classes, devenir un homme, un soldat. Du désert algérien au Débarquement de Provence, de l'éblouissement à fouler le sol français, à la peur, aux tirs, à la perte de ses camarades, le voyage de Jacob dans la France en guerre est fait de découvertes et de pertes. Juifs comme lui, français et musulmans se battent pour sauver un pays qui n'a pas toujours voulu d'eux, apprennent la solidarité, savourent la gloire du libérateur et, dans le rude hiver alsacien, se souviennent de la chaleur de Constantine, de leur famille, de leur foyer. Pendant ce temps, en Algérie, les Melki suivent les actualités, imaginent les combats de Jacob et surtout attendent son retour.

En même pas 200 pages, Valérie ZENATTI réussit à nous transporter au cœur de l'Algérie française, au cœur de la famille Melki, au cœur de la guerre. Porté par le personnage lumineux de Jacob, ce roman est pourtant un livre de femmes, celles qui attendent, celles qui se soumettent, mais qui savent aussi se révolter, lutter, s'imposer. Concentré d'amour, de tendresse et de chaleur, Jacob, Jacob évoque pourtant des épisodes douloureux pour les juifs d'Algérie : leur statut qui change avec les lois vichystes, leur incorporation dans l'armée française et, plus tard, leur fuite devant le FLN. De la France, ils connaissent l'histoire et la géographie mais leur pays, c'est l'Algérie où pourtant on leur dira qu'ils ne sont pas chez eux. Déracinés, ils ont le droit ici, grâce à Valérie ZENATTI, de retrouver un peu de leur passé, des traditions, des odeurs, des saveurs perdues mais profondément inscrites dans leurs gènes. En refermant les pages de cette histoire, pleine de force et de sensibilité, on quitte à regret les Melki mais, comme eux, on garde au fond du cœur le souvenir de Jacob qui murmurait son prénom pour ne pas oublier qu'il n'était pas qu'un matricule. Puissant et bouleversant, à lire.

Merci à Mathilde, aux club de lecteurs Dialogues croisés et au site leslibraires.fr pour ce magnifique moment de lecture.

Conseillé par
30 août 2014

Depuis qu'il a vu le ''Petit géant'' se démener sur un terrain de volley, le jeune Shôyô Hinata rêve de pratiquer ce sport malgré sa petite taille. Malheureusement, les élèves de son collège sont peu nombreux à partager son engouement et c'est très difficilement qu'il réussit à réunir une équipe pour le championnat inter-collèges . Mais si Shôyô a multiplié les occasions de s'entraîner, ses partenaires, eux, manquent cruellement d'expérience. L'équipe se fait laminer par les volleyeurs du collège Kitagawa Daiichi, menés par le ''Roi du terrain'', l'arrogant Tobio Kageyama. Loin de l'abattre, cet échec est un moteur pour Shôyô qui n'a plus qu'un but : se venger de Tobio et l'humilier sur le terrain. Grâce à son admission au lycée Karasuno, doté d'une bonne équipe de volley, il sait qu'il pourra se perfectionner, améliorer son jeu et se préparer à rencontrer Tobio. Pourtant, il déchante dès le jour de la rentrée. Au club de volley, une très mauvaise surprise l'attend : Tobio veut lui aussi faire partie de l'équipe ! Désormais, s'il veulent jouer, ils devront s'entendre.

Sur un schéma assez classique qui joue à fond l'opposition entre deux personnages diamétralement opposés, ce shônen permet une découverte du volley-ball. Il met à l'honneur des valeurs comme l'amitié, l'esprit d'équipe, le dépassement de soi, etc. Si Shôyô, extraverti et énergique entre en opposition avec le sûr de lui et individualiste Tobio, ils ont tout de même en commun leur pugnacité et leur passion du sport. Le premier compense sa petite taille par un impressionnant jeu de jambes, le second, très doué en tant que passeur, doit apprendre tenir compte des autres joueurs de son équipe. Leur antagonisme donne lieu à des scènes amusantes même si l'on suppute que tout cela ne peut finir qu'en une solide amitié.
La trame est donc classique et les dessins le sont tout autant mais ce n'est pas dénué d'intérêt pour autant. L'incursion dans le monde du volley-ball ne manque pas de charme, d'autant que les phases de jeu sont mises à la portée des néophytes par des explications claires. Sympathique et divertissant.

Conseillé par
29 août 2014

Pour se rapprocher de l'hôpital où séjourne leur épouse et mère, les Kusakabe, père et filles, emménagent à Matsugo, dans une vieille maison perdue dans la campagne. Dans ce cadre magnifique et préservé, Satsuki, 11 ans et sa petite sœur Mei âgée de 4 ans, explorent, à leur guise, la maison et ses alentours. Le bruit court que la maison est hantée mais les fillettes n'ont peur de rien, et surtout pas des noiraudes, ces petites boules de suie qui ont envahi les lieux et que l'on ne peut voir que dans certaines circonstances. Mais leur plus belle découverte sera Totoro, fantastique grosse peluche pleine de délicatesse et de bienveillance qui sera leur ange gardien protecteur.

Ni manga, ni BD, Mon voisin Totoro est un ''anime comics'' qui contient les planches du célèbre film d'animation d'Hayao MIYAZAKI. On pourrait penser que ce n'est qu'un produit marketing qui n'apporte rien de plus que le long métrage mais c'est loin d'être le cas. Le tenir entre ses mains, pouvoir le feuilleter à volonté et observer en profondeur chaque dessin est un plaisir à part. La magie est bel et bien au rendez-vous et c'est un bonheur de se replonger dans ce chef-d'oeuvre qui véhicule de belles valeurs comme le respect de la nature et de ses habitants, la bienveillance envers les rêves d'enfant, la solidarité villageoise, l'amour qui unit une famille.
De sa couverture à sa dernière page, Mon voisin Totoro est un enchantement, une plongée dans l'univers féerique de MIYAZAKI, la douceur et l'insouciance de l'enfance. Tendre et espiègle mais surtout d'une grande humanité, une œuvre à découvrir ou à redécouvrir.

10,20
Conseillé par
27 août 2014

Li Yan, le policier pékinois et Margaret Campbell, la légiste américaine, ont abandonné leur projet de mariage qui était incompatible avec le maintien de Li Yan dans la police. Ils vivent ensemble, illégalement, dans l'appartement que les autorités ont mis à la disposition du chef de section et ils y sont bien à l'étroit depuis la naissance de leur fils Li Jon Campbell. Margaret ne travaille plus et se consacre entièrement à son nourrisson, une vie qui ne lui convient guère, surtout que Li Yan, absorbé par son travail, n'est qu'un courant d'air qu'elle voit de loin en loin. Mais le chef de la section n°1 a des excuses. Quatre jeunes femmes ont été assassinées dans des conditions effroyables par un fou furieux qui reproduit scrupuleusement les crimes du célèbre Jack l'éventreur. Les meurtres sont odieux mais les indices sont minces, voire inexistants et Li Yan consacre ses jours et ses nuits à l'enquête. A la recherche du mobile, il entrevoit de terribles perspectives. Et si l'éventreur de Pékin était un policier ? Et si, au delà de ses crimes, il visait personnellement le chef de section le plus connu du pays ? Li Yan doit se rendre à l'évidence : il a un ennemi, particulièrement retors, et surtout prêt à tout pour le faire tomber.

Et voilà le sixième et dernier opus de la série chinoise de Peter MAY, le temps est donc venu du bilan. La trame est toujours à peu près la même : Li Yan enquête, Margaret pratique une ou deux autopsies et leur vie de couple connaît plus de bas que de hauts. Au fil des tomes, les répétitions s'accumulent, Margaret est une blonde aux yeux bleus dont la peau très blanche est parsemée de tâches de rousseur. Li Yan est très grand pour un chinois puisqu'il culmine à 1,80 mètres. On n'échappe pas non plus à la recette des ''jianbing'', les délicieuses crêpes dont se régale Li Yan chaque matin et on saura que la révolution culturelle a fait bien des dégâts dans la société chinoise.
Mais la série s'est améliorée au fil des épisodes et constitue un bon panorama de la société chinoise et de son évolution rapide des dernières années, avec son formidable essor économique et son corollaire, l'élargissement de la fracture sociale. Et, à côté de ses deux héros toujours empêtrés dans leur relation amoureuse compliquée, Peter MAY a su faire vivre des personnages secondaires plutôt intéressants, entre autres Wu et Qian les fidèles collaborateurs de Li Yan et Mei Yuan, la vendeuse de jianbing, intellectuelle réprimée durant la révolution culturelle, avec qui le policier se livre à des jeux d'esprit dont elle sort toujours gagnante.
La série se termine donc, sans fin véritable, l'auteur ayant choisi de laisser ses héros à leur routine et à leur destin. Finalement, elle fut intéressante et plaisante mais peut-être faut-il éviter la lecture des tomes les un après les autres pour ne pas saturer. A lire...à petites doses.